La construction des paquebots à Saint-Nazaire

Extrait du livre : Histoire du Ruban bleu de l’Atlantique, décembre 2013

La marine en bois du Brivet

Si, du côté français, le début de cette épopée doit beaucoup aux frères Pereire et aux 15 contremaîtres des chantiers écossais Scott, elle doit aussi aux ouvriers de la Brière experts depuis de nombreuses années dans la construction de grands bâtiments en bois. Il ne s’agissait nullement de barques ou chalands qu’on retrouve en Brière et dans toutes les régions de marais, mais de grosses unités destinées à la haute mer.

Déjà en 1777, on retrouve trace d’un chantier naval à Méan. Quelques dizaines d’années plus tard, à Méan, le principal chantier briéron devait mettre à l’eau 88 bateaux à voiles entre 1852 et 1882, des bateaux de commerce ventrus et assez mauvais marcheurs.

Ces petites entreprises ne pouvaient rivaliser avec les chantiers qui commençaient à construire des navires à coque métallique, mais leurs ouvriers furent vivement appréciés et surent rapidement passer du métier de charpentier à celui de métallurgiste. Le dernier bateau des chantiers du Brivet, un brick-goélette, le Guillaume Tell fut lancé en 1884.

Par ailleurs, l’équilibre ancestral de la Brière se fragilisait. Les Nantais achetaient moins de tourbe briéronne et préféraient le charbon. Des rumeurs d’assèchement du marais circulaient. Il fallait vivre et il était prudent d’aller travailler aux chantiers navals de Saint-Nazaire. On serait encore chez soi.

La conversion du bois au métal fut donc rapide, donnant foi au dicton cru mais élogieux qui fait naître les Briérons avec une équerre et un compas au cul.

On pouvait reprocher aux constructeurs de bateaux en bois leur empirisme mais certains charpentiers travaillaient à la perfection sans aucune esquisse préalable.
« Tout dans la tête » …

La Brière fut donc une pépinière de charpentiers, de marins et à l’occasion de corsaires avant d’être le berceau d’habiles métallurgistes.

Naissance d’un port d’après le préfet Héquet

Difficile de mieux saisir l’ambiance de révolution industrielle et de compétition entre nations développées en ces années 1861 et 1862 à Saint-Nazaire, qu’en reproduisant le texte d’un discours du préfet Héquet. Il décrit la naissance du port et des chantiers navals en les replaçant dans le paysage des autres grands ports : Le Havre, Rouen, Nantes, Bordeaux, Marseille et en imaginant le commerce futur de ces ports avec le monde entier.

« On ne sait trop combien d’efforts avaient été faits jusqu’ici pour établir entre la France et l’Amérique une ligne de communication régulière, et comment ces efforts avaient toujours échoué. Apparemment, on ne l’avait pas encore voulu d’une volonté assez forte, assez persévérante, ou peut-être aussi n’avait-on pas mis au service de cette idée des capitaux suffisants. Il n’y a pas un industriel aujourd’hui qui ne sache que le succès est toujours du côté des gros capitaux. On a donc pu croire au succès, malgré tant d’échecs successifs, le jour où l’intervention de la société du Crédit Immobilier a été résolue.

La nouvelle compagnie transatlantique qui vient de commencer ses opérations est en effet une émanation de la société du Crédit Immobilier. Elle a pour président Monsieur Émile Pereire qui l’a formée, l’inspire et la dirige. Aux termes d’un contrat passé, il y a trois mois, entre la compagnie et le gouvernement, 4 bateaux de grand modèle doivent faire service postal régulier de Saint-Nazaire à La Vera Cruz avec escale à la Martinique, à San Yago et à Tampico. Un de ces navires, la Louisiane, est déjà parti. Les autres suivront de mois en mois. Le 14ᵉ jour de chaque mois sera la date invariable du départ.

Le 2 avril un train spécial organisé par les soins de la compagnie de chemin de fer d’Orléans a transporté de Paris à Nantes, en huit heures, une caravane d’administrateurs, de financiers, d’industriels, d’hommes politiques, de publicistes, d’hommes de lettres et d’artistes  invités à prendre part à la fête. Un banquet les attendait à Nantes offert par la chambre de commerce de cette vaste et opulente cité. Chacun a dit avec plus ou moins de talent et de convenance ce qu’il y avait à dire eu égard à sa position. Ces discours, après tout, ne sont pas toujours de vaines paroles. Prononcées par des hommes qui pour la plupart ont en main la direction des plus grandes affaires, on y trouve parfois des renseignements précieux sur les besoins d’une contrée,  les tendances d’une industrie ou des vues qui sont comme la révélation de l’avenir. Tel est par exemple cette phrase prononcée par M. Chevreau : Nantes et Saint-Nazaire, reliées par une ligne de chemin de fer et un fleuve approfondi se serviront, se compléteront l’une dans l’autre. Les cafés et les sucres, les riches engrais, le coton même y afflueront de toutes parts ; ce sera l’une des grandes portes par laquelle la jeune Amérique versera sur le Vieux monde son trop-plein de richesses. Des usines, des manufactures formeront le long du fleuve entre les deux villes comme un immense trait d’union et de cette cité qui n’était il y a 10 ans qu’un obscur village, l’empereur aura fait l’un des plus magnifiques instruments de travail que le commerce et l’industrie puissent jamais rêver.

Voilà, on doit le reconnaître, une brillante perspective. L’usine à laminer le fer et l’immense établissement d’Indret qui s’élèvent dans une île entre Nantes et Paimbœuf, semblent prouver déjà que les prévisions de M. Émile Chevreau sont loin d’être chimériques. Il répondait là d’ailleurs à la plus vive des préoccupations nantaises. La Loire, jusqu’à son embouchure a une surface immense mais point de profondeur, un lit ensablé et variable. Paimboeuf n’est guère plus accessible que Nantes elle-même. Saint-Nazaire qui s’élève à l’embouchure n’était il y a 12 ans qu’un village. Une volonté toute-puissante l’a transformée. On y a creusé un bassin à flot de 180 000 m² de superficie dont la profondeur varie de 4,18 m à 7,5m. La partie la moins profonde suffit aux bâtiments du commerce. L’autre peut recevoir des navires de guerre : ils y entrent par deux passes garnies d’écluses qui s’ouvrent quand le flot monte et se referment quand il descend de telle sorte que le niveau du bassin ne varie pas. Chaque passe est défendue par un bastion et toutes deux sont protégées par un môle d’abri. Ce port si vaste et si sûr ne suffit déjà plus. Celui-ci est bordé de quais superbes. Sur deux de ses quais au Nord et au couchant se dressent des maisons neuves, grandes, élégantes. De belles rues sont déjà tracées à l’entour, et quelques-unes presque entièrement bâties. Nous y avons vu un hôtel de ville récemment construit de proportion médiocre, il est vrai, mais d’une jolie architecture. Saint-Nazaire n’a pas encore beaucoup d’habitants mais il peut recevoir autant qu’on voudra et semble les appeler. En ce moment les armateurs déchargent leurs navires à Saint-Nazaire et font arriver leurs marchandises à Nantes par le chemin de fer ou sur des bateaux plats. Ne s’apercevront-t-il pas bientôt qu’il leur serait plus commode et moins dispendieux d’avoir leurs magasins et leurs bureaux sur le quai même de Saint-Nazaire, comme les négociants du Havre, de Bordeaux et de Marseille ?

Il est hors de doute que d’ici à 20 années, tout le commerce maritime de Nantes opérera ce déménagement où il a tout à gagner. Les industries qu’il emploie les suivront nécessairement et Saint-Nazaire deviendra une puissante cité commerciale, rivale du Havre comme de Bordeaux et répandant les produits du Nouveau Monde, de l’Afrique, de l’Australie, de l’Asie orientale dans le vaste bassin de la Loire. Nantes ne sera plus une ville maritime. Elle sera plus que jamais une ville industrielle. Et qui songeait lui disputer son rang de chef-lieu, ses établissements scientifiques et ses riches musées ? Il arrivera la ce qui est arrivé en Normandie. Le Havre est devenu un port commercial de premier ordre, et Rouen n’y a rien perdu. »

Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789

Elle date un peu cette déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen mais elle reste d’actualité, concise, et utile pour appréhender le rôle des élus et des autres représentants du peuple, non élus, insuffisante aussi et complétée par les lois sur les associations  de 1901 et sur 1905, sur les droits des plus faibles : enfants, malades, handicapés, par exemple. Voici quelques articles pertinents et utiles de la DDHC.

Art. 6. La Loi est l’expression de la volonté générale. Tous les Citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs Représentants, à sa formation. Elle doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents.

Art. 7. Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la Loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la Loi doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance.

Art. 8. La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée.

Art. 9. Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi.

Art. 10. Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la Loi.

Art. 11. La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’Homme : tout Citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi.

Art. 12. La garantie des droits de l’Homme et du Citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée.

Art. 13. Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés.

Art. 14. Tous les Citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d’en suivre l’emploi, et d’en déterminer la quotité, l’assiette, le recouvrement et la durée.

Art. 15. La Société a le droit de demander compte à tout Agent public de son administration.

Art. 16. Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n’est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution.

Art. 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

La moralisation de la vie publique

Il est bon de ne pas tout mélanger quand on parle de moralisation de la vie politique. La corruption  dans le monde des affaires et du sport détourne de l’argent mais en politique, en plus, elle détourne de l’argent public qui provient de nos impôts ou qui aurait du être versé en impôt.

Les exemples ne sont pas si fréquents. Actuellement Petrobras au Brésil concerne des députés. Pour les députés Cahuzac et Thévenoud, il s’agissait  de fraude fiscale en principe récupérée avec majoration et amendes. Pour Tapie la récupération prendra du temps… Ces histoires ont au moins permis une loi de moralisation et de transparence et vont initier un état d’esprit plus conforme à notre déclaration d’août 1789.

Elles nous montrent l’importance de médias libres et d’une justice indépendante du pouvoir, bénéficiant de moyens suffisants pour une meilleure efficacité.

Tout autres sont les phénomènes de clientélisme et les copinages avec les amis ou la famille. Ce n’est pas de la corruption mais il s’agit encore d’argent public employé de façon discutable. Il s’agit d’actes légaux actuellement mais qui nous décrédibilisent aux yeux de nos voisins de l’Europe du nord dont les mœurs sont moins laxistes en la matière.  À Saint-Nazaire, ce copinage peut prendre la forme d’aides à certaines associations. C’est partout pareil, direz-vous. Pourquoi ne pas le pratiquer nous aussi alors ? On pense au clientélisme que l’on prête aux Balkany, à Serge Dassault…

Il convient d’aider les associations qui font du bon travail à condition qu’elles subissent des contrôles et une mise en concurrence.
Enfin les conflits d’intérêt sont parfois inévitables dans le privé et le public. Ils doivent être signalés comme la loi le prévoit déjà et évités lorsque l’on a des responsabilités politiques.

Abrégé de Sécurité sociale et Mutuelles

Source la lettre de Galilée      

Progressivement, l’Etat a  repris la main sur la Sécurité sociale qui gère notamment le secteur de la santé. Au cœur du pacte républicain, élément emblématique de la solidarité, la Sécurité sociale est  un boulet pour l’Etat. Elle croule sous les déficits, même s’ils sont effacés par leur transfert à la CADES créée en 1996 qui est devenue une sorte de caisse de défaisance.
Résultat : dans le cadre de la politique de réduction des déficits publics visant à atteindre le fameux niveau de 3%, fixé par le traité de Maastricht et imposé par Bruxelles, la Sécu fait figure de mauvais élève.
En créant l’ONDAM, l’Etat s’est donné les moyens de maitriser les dépenses. Les premières années, l’Objectif n’était pas respecté et il fallait, en cours d’exercice, appliquer des mesures restrictives. Mais, depuis 4 ans, il est tenu et même sous-exécuté, ce qui est une réelle performance même si elle est un peu artificielle, notamment parce que les faibles dotations attribuées aux hôpitaux se traduisent par une dette pour les établissements. En d’autres termes, le déficit est transféré, telle une patate chaude ! L’Etat joue au sapeur Camembert qui creusait un trou pour en boucher un autre.

Le gouvernement se félicite de ce contrôle des dépenses, confondant maitrise et régulation.

La maitrise à grands coups de baisse des dotations, de blocages tarifaires, de ponction sur les laboratoires pharmaceutiques et de déremboursement est un exercice relativement facile.
Mais la régulation qui consiste ou consisterait à faire baisser les coûts de production des soins par une refonte de l’organisation des hôpitaux, à mettre en place un système d’information entre tous les acteurs du système de santé, à imposer le suivi des recommandations de la Haute autorité de santé, à éviter les actes et les consultations redondants, etc.. est un exercice plus compliqué et plus risqué politiquement….
L’Etat sait maitriser mais ne sait pas réguler…
Et si, pour sortir de cette impasse, il faisait appel à un allié qui n’attend que cela depuis longtemps : les assureurs complémentaires et plus précisément la Mutualité.

Depuis longtemps, la Mutualité se plaint d’être réduite au rôle de supplétif en ayant pour seule mission de prendre en charge ce que l’Assurance-maladie obligatoire dérembourse ou ne veut plus prendre en charge. Elle revendique d’être un gestionnaire à part entière du risque et vise à se substituer à la Sécurité sociale.
Lentement mais surement, elle est en train de gagner ce pari hautement stratégique.
Depuis plusieurs années, les assureurs complémentaires ont mis en place des réseaux de santé et des plateformes à partir desquelles ils orientent leurs adhérents vers des professionnels de santé avec lesquels ils ont contractualisé. En 2013, une loi a consolidé les réseaux de santé excluant toutefois les médecins. Mais les assureurs ont trouvé le moyen de contourner l’obstacle. Ainsi, la société filiale de plusieurs complémentaires santé – MAAF, MMA, Alliance, IPECA et Mutuelle générale de la police – a annoncé son intention de contractualiser avec des établissements hospitaliers – et pas directement avec les médecins – dans le domaine de l’orthopédie afin de « créer un réseau de soins d’excellence » dans cette spécialité amorçant ainsi la création d’un véritable réseau de soins, sur le modèle des HMO américains.
Et ce n’est qu’un début parce que ces embryons de réseaux de soins ne sont qu’une pièce d’un gigantesque puzzle.

En effet, les Mutuelles ont trouvé le moyen, en 2012, de mettre un pied dans le champ conventionnel avec les dépassements d’honoraires des médecins du secteur II, objets d’incessantes polémiques sur leur niveau excessif et discriminatoire. Le gouvernement – qui les avait dans son collimateur – a imposé à l’Assurance maladie de proposer aux médecins un contrat visant à encadrer leurs dépassements et à les faire prendre en charge par les… complémentaires.
Jouant le rôle de chevalier blanc de l’égalité des soins, la Mutualité a mis sur la table 150 millions d’€ pour financer ces dépassements mais a exigé, en contrepartie, de définir les critères d’éligibilité et d’avoir accès aux données de l’Assurance-maladie dans ce domaine.
La Mutualité a ainsi acheté son ticket d’entrée à la table des négociations conventionnelles.

La prochaine étape a été la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés qui se met en place le 1er janvier 2016.
Et si l’enjeu caché de cette avancée sociale était la substitution, pour la gestion du risque santé, de la Sécurité sociale par les complémentaires?
La vraie nouveauté de cette réforme ne réside pas dans l’augmentation du nombre de personnes bénéficiant d’une complémentaire – selon plusieurs rapports, la progression ne sera que de 1 ou 1,5% – mais dans la nature des contrats et les rapports de force.
Le contenu des contrats que les complémentaires doivent proposer est défini par un décret qui a déterminé une sorte de « panier de soins », c’est-à-dire – selon la définition communément admise – «
l’ensemble des produits, services et prestations de santé auxquels chaque assuré social doit pouvoir accéder sans barrière financière ». Grosso modo, il s’agit de couvrir le champ du ticket modérateur sur les consultations et les actes médicaux, sur les médicaments remboursés à 65%, sur les analyses et examens en tout genre, sur les frais de transport sanitaire et sur les frais de séjours hospitaliers. Ils devront aussi prendre en charge le forfait hospitalier. En ce qui concerne les dépassements d’honoraires des médecins, les contrats devront rembourser l’intégralité des dépassements des médecins ayant souscrit le fameux contrat plafonnant les dépassements d’honoraires et à 125% en 2015 puis 100% en 2016, les dépassements des médecins du secteur II n’ayant pas souscrit ledit contrat.
Pour les complémentaires, c’est un changement total de modèle économique. Elles vont devoir changer de terrain de jeu. Fini le temps où pour appâter le chaland, il fallait se lancer dans une sorte de course à l’échalote consistant à proposer toujours plus de prises en charge de dépassements, de prestations annexes (chambre individuelle, télévision, etc..), de pratiques plus ou moins médicales, comme les médecines douces ou encore l’homéopathie qui étaient autant de produits d’appel. Elles vont devoir répondre à des appels d’offres lancés par les entreprises et les branches professionnelles pour la souscription des contrats responsables de groupe.
Cette mutation fait leur jeu. En effet, cette logique du panier de soins redistribue les cartes du pouvoir médico-économique dont les complémentaires sont les grands gagnants. Non seulement, leur marché s’élargit et se stabilise mais, surtout, leur pouvoir sur l’ensemble du système médico-économique se renforce. En effet, dès lors qu’elles ont l’obligation de prendre en charge l’intégralité des tickets modérateurs, les complémentaires ne peuvent plus être tenues à l’écart des évolutions tarifaires et des niveaux de remboursement de l’Assurance-maladie obligatoire.
Les mutuelles, en particulier, sont appelées à devenir l’interlocuteur – pour ne pas dire le partenaire – privilégié de l’Etat en matière d’assurance-maladie. Aucune évolution du périmètre du panier de soins ne pourra se faire sans leur accord.